Appel à contributions :
Terre et pouvoir en Écosse : Histoire, droit et environnement Colloque international de deux jours
Où : Paris, Université Paris-Panthéon-Assas, salle des Conseils
Quand : 26-27 juin 2025
Qui : Université Paris-Panthéon-Assas (Centre d'Études et de Recherches de Sciences Administratives et Politiques, CERSA, CNRS UMR 7106) et Université de Picardie Jules Verne, Amiens (équipe CORPUS)
Breathes there the man, with soul so dead, Who never to himself hath said,
This is my own, my native land!
(Il y respire, l’homme à l’âme si morte, Qui ne s’est jamais dit à lui-même,
C’est mon propre pays, ma terre natale !)
L’auteur de ces vers célèbres, Sir Walter Scott, poursuit ensuite la description de sa « terre natale » : «O Caledonia ! stern and wild/… Land of brown heath and shaggy wood/ Land of the mountain and the flood » (Ô Calédonie, sévère et sauvage/… Pays de bruyère brune et de forêts broussailleuses/ Pays de montagnes et de torrents). Bien que ces mots s'inscrivent dans la tradition romantique nationaliste consistant à proclamer son amour envers sa terre natale à travers l’amour porté à son paysage, les mots de Scott reflètent la place particulière qu’occupe la terre dans l'identité de l'Écosse. Le paysage écossais définit l’identité écossaise, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ses frontières. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Donald Dewar a choisi de citer les mots de Scott lors de l'ouverture du nouveau Parlement écossais le 1er juillet 1999.
Il existe peu de nations pour lesquelles la perception de la terre est aussi fondamentale et aussi délicate. Historiquement, l'Écosse combinait une forte proportion de terres difficiles et souvent peu productives avec la nécessité de maintenir une classe de guerriers efficace pour résister à l'expansionnisme anglais. C’est ainsi que s’est développée une aristocratie fortement militarisée, dotée de vastes domaines fonciers et d'innombrables serviteurs, sur lesquels elle exerçait un pouvoir quasi princier. Si un tel modèle reposant sur une concentration de la propriété foncière était loin d’être exceptionnel à l'époque normande, il demeure aujourd’hui, alors même que les relations sociales, économiques et juridiques ont connu des changements profonds. En particulier, les « Clearances » (déplacements de populations) des XVIIIe et XIXe siècles ont bouleversé les obligations mutuelles qui sous-tendaient l'ancien ordre féodal, les grands propriétaires terriens cherchant à transformer leurs domaines en vue d’une exploitation agricole intensive. L'héritage de ces « Clearances », fait de conflits sociaux, de dégradation de l'environnement et de profondes inégalités matérielles, a conféré à la terre un rôle particulièrement complexe et controversé dans la vie culturelle, politique et juridique de l'Écosse d’aujourd’hui.
À ce jour, on dénombre environ 432 familles qui possèdent la moitié de toutes les terres privées en Écosse, faisant de ce pays l’un de ceux où la propriété foncière est la plus concentrée au monde. Reflétant cette situation, la réforme foncière est devenue, depuis la dévolution, une question essentielle de la politique écossaise. Les initiatives législatives successives se sont principalement concentrées sur la fin du droit féodal et la simplification des titres fonciers, ainsi que sur la création du « right to roam » (droit à l’errance) et l'établissement d'un « community right to buy » (droit communautaire d’achat) auprès des propriétaires fonciers existants. Un nouveau projet de loi, le Land Reform (Scotland) Bill, a été déposé au Parlement écossais le 14 mars 2024 afin, notamment, d'accroître le pouvoir des communautés locales lors de la vente de grandes propriétés foncières de plus de 1 000 hectares, lesquelles représentent plus de 50 % des terres écossaises.
L'objectif de cette conférence internationale et pluridisciplinaire de deux jours est d'explorer les préoccupations actuelles en matière de réforme foncière dans ses contextes sociaux, culturels, juridiques et environnementaux. Ce colloque se propose de rassembler des spécialistes de diverses disciplines, notamment l'histoire, la géographie, le droit, la littérature, les sciences politiques, l'économie, la sociologie et les arts, ainsi que des spécialistes de l'environnement et du changement climatique, afin d'explorer les interactions entre la terre et le pouvoir en Écosse selon trois axes principaux :
- Histoire : racines historiques et symboliques de la terre et de l'identité/du pouvoir en Écosse, et leurs implications passées et contemporaines, l’usage ou le mésusage de l'histoire pour revendiquer ou conserver des droits, l'histoire des paysages écossais dans l'art et la science, l'histoire de l'environnementalisme en Écosse, etc.
- Le droit : le droit foncier et la réforme des politiques foncières en Écosse, ses origines et ses préoccupations actuelles, telles que le « right to roam » (droit à l’errance) et le « Scottish Outdoor Access Code », la réforme foncière, la propriété des communautés, la transmission et l'héritage, la notion de « justice environnementale », etc.
- L'environnement : l'éco-activisme et le développement durable, par exemple le « rewilding » (réensauvagement), le reboisement et le repeuplement, les énergies renouvelables, l'écotourisme et le développement rural, l'environnement comme source de richesse et de pouvoir, le nationalisme vert, la nature et l'identité écossaise, etc.
La conférence se tiendra en anglais et en français, et une sélection d'articles sera publiée dans une publication académique après la conférence.
Veuillez envoyer vos propositions (300 mots), un titre et une courte biographie (en français ou en anglais) au comité scientifique avant le 30 janvier 2025 :
- Clarisse Godard Desmarest, Professeur à l'Université de Picardie Jules Verne, clarisse.godarddesmarest@u-picardie.fr
- Juliette Ringeisen-Biardeaud, Maître de conférences à l'Université Paris-Panthéon-Assas juliette.ringeisen-biardeaud@u-paris2.fr
- Aurélien Wasilewski, Maître de conférences à l'Université Paris-Panthéon-Assas, aurelien.wasilewski@u-paris2.fr